"La peau des autres"
16 octobre > 14 novembre 2009
Entrons dans cet univers déglingué qui chute en lambeaux d’être tout doucement comme en apesanteur. Effleurons du regard ces palettes de vie où pleurent lettres et mots. Dans le gris et le blanc, dans le calme et le vide, l’harmonie déjantée de Michel Potage rejoint la mise en scène d’une pièce de Beckett. Dans le vide du théâtre apparaissent des paysages zonés qui s’émiettent comme la vie de ceux qui les habitèrent. Les murs délabrés gardent encore la marque de leurs occupants. La trace d’un meuble, une chaise oubliée, une cloison isolée. Mise en scène d’instants flottants, muets, dans l’espace, cette nouvelle série faite de morceaux de vie contrecollés, qui se brisent en rêves échoués sur les trottoirs de la réalité, rejoint le dépouillement de la série des Façades que Michel Potage avait créée en s’inspirant du visage de Paris. Après la loi Malraux sur le ravalement, la ville n’était plus qu’une suite d’échafaudages dont les nacelles se balançaient au gré du vent. Dans une accumulation poétique, bouts de cartons, nids d’oiseaux, palettes faites d’assiettes en papiers deviennent les ex-voto d’une cité épuisée, reliefs d’un festin recraché par la ville, gigantesque nature morte après l’orgie d’un ogre. Michel Potage revêt La peau des autres et réunit pour nous ses fragments d’une mémoire collective, étrangère et intime, Roman interdit où l’anecdote devient la quintessence de vies dont on ne sait où elles sont parties. Murs et cadres forment les indications scéniques de cette exposition où Michel Potage torpille les genres avec la liberté de l’artiste aux prises avec l’évanescence du présent. Wall, les murs ont la parole. Lélia Mordoch |